ARCHITECTE
Dessiné par Bigoin Duvergie
Construit en 1968 à La Perrière à Lorient
L’épreuve est ouverte aux monocoques d’une taille comprise entre 22 et 35 pieds (10,67 mètres). A l’examen du parcours, il s’avère que la route sud au portant est préférable. Pen Duick III et IV sont opérationnels mais ne répondent pas à ce programme. Il faut construire un nouveau bateau avec des ballasts destinés à recevoir du lest liquide ; le nouveau Pen Duick est l’ancêtre des 60’ mono qui courent aujourd’hui autour du monde. Pen Duick V gagne largement (dix jours d’avance sur 6 000 milles). Après être resté longtemps en Méditerranée, connu plusieurs propriétaires, Pen Duick V est aujourd’hui la propriété du Musée national de la Marine et navigue le plus souvent en Bretagne sud.
L’ancêtre des 60 pieds open
Dans une longueur proche de dix mètres, Tabarly avait été satisfait du programme de l’Aïkido, un bateau de série dessiné par Michel Bigoin et Daniel Duvergie. Il s’agit d’un bateau plutôt large et disposant d’un bouchain longitudinal à la flottaison pour réduire la surface mouillée au portant tout en augmentant la flottabilité dès les premiers angles de gîte. C’est à ces architectes que Tabarly va s’adresser pour dessiner Pen Duick V en vue de la Transpacifique. Dans la mesure où la longueur est bloquée, la coque ne possède quasiment pas d’élancement afin de disposer d’une flottaison maximum. L’étude de sa stabilité de forme tient surtout compte du portant, allure favorite de l’épreuve : bonne largeur et bouchain à la flottaison. Sa stabilité de poids est assurée par un long aileron de 2,30 m portant une torpille de 400 kg en plomb et équipé d’un trimmer sur le bord de fuite pour combattre la dérive. De façon à renforcer la stabilité du bateau sans l’alourdir et compenser la gîte selon les allures, Tabarly imagine un système de ballasts remplis d’eau de mer à l’aide de pompes manuelles (20 minutes pour remplir le ballast de 500 litres). Cette idée provient des Sand Baggers, ces bateaux américains très voilés qui compensent la gîte avec des sacs de sable placés au vent. Une nouvelle « trouvaille » qui équipera, plusieurs années plus tard, les bateaux des tours du monde BOC et Vendée Globe Challenge !
Le plan de voilure est celui d’un simple sloop, mais une fois encore Eric Tabarly innove en équipant le bateau d’un dispositif permettant de passer, seul, de 63 m2 au près à 150 m2 au portant. Des focs jumeaux de 65 m2 sont placés sur des étais à rouleaux et sont tenus au point d’écoute par des tangons télescopiques de 7,50 m. Construit en aluminium par les Chantiers et Ateliers de La Perrière, il est mis à l'eau le 4 janvier 1969.
Pen Duick V est transporté en Californie par cargo. Comme en 1964, le bateau de Tabarly est le seul concurrent à être conçu pour l’épreuve longue de 6000 milles. Par le sud et les vents portants, Pen Duick V enlève la course en 39 jours et 15 heures à la moyenne de 6 noeuds. Jean-Yves Terlain termine 2ème.
Aujourd’hui, l’arrivée victorieuse et silencieuse de Pen Duick V à Tokyo a de quoi étonner. Le jury n’a pas prévu un temps aussi court et personne n’attend Eric sur la ligne d’arrivée. Il se pointe lui-même, entre au port sous grand voile, puis accoste le long d’un quai pour passer la nuit. Le lendemain, il met pied à terre dans un village endormi et part à la recherche du jury à travers la ville. Portant une barbe de 40 jours et un blue-jean troué, il chemine dans les rues. C’est dans un mauvais anglais que des passants japonais lui indiquent le petit musée des phares signalé dans les instructions de course. C’est à cet endroit, par téléphone qu’il entre en contact avec le secrétaire du Nippon Océan Racing Club qui le félicite et lui donne rendez-vous à bord de Pen Duick V.
Revenu en France par cargo, le cinquième « Pen Duick », appartenant à la Société qui gère le port de plaisance de St-Raphaël, est vendu à un propriétaire toulonnais qui le modifie pour le rendre plus agréable à vivre. L’arrière est allongé et les ballasts supprimés pour donner plus de volume à l’intérieur. Il faut alors modifier la quille et augmenter le lest. Il navigue en croisière durant une vingtaine d’années. En 90, il devient la propriété de Serge Legars qui projette une navigation familiale autour de l’Amérique du sud, mais devra annuler son voyage. C’est en 1992 que le Musée national de la Marine se rend acquéreur du vainqueur de la Transpacifique.
Aujourd'hui
Il est confié à l'Association Eric Tabarly qui l'entretient et organise ses navigations. En dehors des quelques mois d’hivernage -novembre à février- le sloop navigue toute l’année.
© Daniel Gilles